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Face à la situation des réfugiés burundais établis sur son sol, la Tanzanie détonne et étonne

Depuis la dernière visite du président burundais en Tanzanie le 20 juillet dernier, quelque chose a notablement changé dans les relations entre les réfugiés burundais établis en Tanzanie et les autorités de leur pays d’accueil. Certes les réfugiés burundais étaient loin d’être, tout à fait, en odeur de sainteté avec les autorités tanzaniennes, mais ces dernières respectaient tout au moins les principes inspirés par la Convention de Genève relative au statut des réfugiés. La Tanzanie tenait encore à sa tradition de terre d’accueil et n’oubliait guère que le Burundi a toujours produit des réfugiés. Seulement voilà, la situation de deux poids deux mesures qu’on observe en ce qui concerne le traitement des réfugiés d’aujourd’hui et ceux d’hier s’inspire des principes et des motifs que seules les autorités tanzaniennes peuvent comprendre et probablement expliquer.

Depuis quand ignorent-elles que les réfugiés ont pour spécificité de “voter avec leurs pieds” et qu’on ne peut se permettre de les refouler arbitrairement car, ce sont eux qui savent et peuvent expliquer les raisons qui sont à l’origine de leur statut. Au lieu donc de les écouter et apaiser, un tant soit peu, leur misère, la brutalité a remplacé la charité et le respect de la situation qu’ils endurent au quotidien; la chicotte est devenue l’unique traitement dont ils bénéficient. Et comme si cela ne suffisait pas, des morts ont été déplorés le 14 août 2017 dans le camp de Nduta dont celle d’une femme qui venait d’accoucher, leur unique péché ayant été de refuser de retourner de force au Burundi car, sachant pertinemment qu’une mort certaine les y attendrait à leur retour.

L’Alliance des Burundais du Canada (ABC) est fortement préoccupée par cette situation et s’insurge contre le traitement que les autorités tanzaniennes infligent à ces réfugiés qui sont pourtant en droit d’être protégés. La Tanzanie ne peut se dérober de sa responsabilité, étant entendu que c’est un partenaire de longue date du HCR. Bien plus, elle ne peut se permettre de fouler aux pieds les principes auxquels elle a souscrit, en ratifiant la Convention de Genève en matière de traitement et de protection des réfugiés. Par ailleurs, il est à noter que ce pays n’en est pas à sa première expérience : les autorités burundaises actuelles ayant été naguère en situation de demandeurs d’asile et par conséquent accueillies, protégées et même soutenues par la Tanzanie. Loin de nous l’idée d’aller jusqu’à croire que ce pays les préparait à ce qu’elles sont devenues par la suite, mais le comportement que la Tanzanie affiche actuellement face aux réfugiés burundais détonne et étonne.

Cela dit, même s’il est difficile d’établir pertinemment une quelconque relation de cause à effet entre l’attitude des autorités tanzaniennes et la situation de la médiation, il n’est pas injuste d’imaginer pourquoi le dialogue inter-burundais tant souhaité et appuyé par la communauté internationale bat de l’aile.

Tant que le pays qui abrite les travaux de ce dialogue ose se comporter de la sorte, on imagine difficilement comment il pourrait en être autrement. Mais qu’à cela ne tienne, l’on peut tout de même croire que même en politique, l’éthique dispose encore d’un minimum de place et de considération. Et si tel en est le cas, l’on peut alors espérer qu’aucune morale ne saurait permettre que les droits des réfugiés soient sacrifiés, sous prétexte qu’un pouvoir aux abois tente désespérément de se payer le luxe d’un marketing politique sur le dos de ces déshérités, en essayant de montrer, à travers le rapatriement forcé de ces derniers, qu’il est encore fréquentable.

Face donc à la gravité de la situation, l’ABC demande ce qui suit:

  1. A la Tanzanie

De respecter ses engagements en matière d’accueil et de protection des demandeurs d’asile et de s’abstenir de les persécuter;

– de réserver une fin de non-recevoir aux autorités burundaises qui veulent s’attirer la sympathie des bailleurs de fonds sur le dos des réfugiés, en provoquant leur rapatriement forcé, histoire de montrer que la paix serait revenue au Burundi;

– de donner plutôt un coup de pouce à la médiation dont elle abrite les travaux afin que le dialogue inter-burundais reprenne et qu’il aboutisse à une paix durable.

  1. A la communauté internationale

De faire tout ce qui est en son pouvoir pour que les réfugiés burundais où qu’ils se trouvent, spécialement ceux vivant en Tanzanie, cessent d’être un fonds de commerce; qu’ils soient plutôt protégés et soutenus, conformément aux recommandations pertinentes de la Convention de Genève relative au statut des réfugiés.

  1. Au Haut Commissariat des Nations Unies pour le Refugies, HCR

– De faire toujours preuve de neutralité, en appuyant les réfugiés burundais et en pesant de tout son poids, afin que sa mission soit respectée et facilitée par les autorités tanzaniennes;

– de tout faire pour que tous les enfants en âge scolaire et tous ceux qui n’ont pas pu poursuivre leurs études à cause de la crise, puissent retrouver le chemin de l’école.

  1. A la médiation

– De faire davantage preuve de responsabilité, de diligence et de neutralité, pour que le dialogue inter-burundais reprenne, qu’il soit absolument inclusif et qu’il porte des fruits;

– d’éviter le piège de faire le lit des politiciens, quel qu’en soit le bord, dont certains sont souvent préoccupés par des intérêts tout à fait personnels, au détriment des réfugiés dont le sort est prétendument leur souci majeur.

 

Fait à Ottawa le 21 août 2017

© L’Alliance des Burundais du Canada, ABC

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